Jeudi 18 nov. - J+4

Enfin, ça commence

Je suis convaincu que c'est au bout de 3 ou 4 jours qu'on commence à pouvoir tirer des conclusions sur ce qui se passe en course. Bon départ? Mauvais départ? Difficile de faire illusion à ce stade. J'espère être à peu près en forme. Grosse inquiétude sur mes sempiternelles douleurs aux pieds en vélo.


J5 - le live, par Valérie

La journée de jeudi a été riche en évènements, attention, article long !

Mais d'abord les questions des lecteurs :

1 - une différence de moins de 2 km entre Christian et Dave ? Attention, en réalité les seules distances comptées sont le nombre de tours effectués, et un tour fait un peu moins de 2km. Donc si la différence est de moins de 2km, c'est simplement un tour d'écart.

2 - les douleurs aux pieds et aux tendons ? Pas d'inquiétude, les tendons ont arrêté de faire plop-plop. Et pour les pieds, Christian a inventé la tactique du siècle : à chaque arrêt il enlève ses chaussures et passe des chaussons d'abord. Puis il vaque à ses occupations : repas, pipi, crème solaire... les doigts de pieds en éventail. Ça marche! Il faut savoir qu'il est venu sur la course avec des chaussures de vélo un peu trop petites. Dès le début, il a donc eu l'idée d'enlever ses chaussettes. Puis il a fallu mettre de l'Elastoplast sur les zones de frottement. Et la tactique des chaussons complète le tout pour son plus grand confort.

3 - le niveau en course à pied de Dave Clamp ? C'est aussi le grand sujet de conversation ici à Monterrey. Christian est un inconnu et tout le monde se demande, me demande et lui demande quoi en penser. Bref, pour Christian, si vous ne savez pas, allez faire un tour sur les autres pages de ce site. Et pour Dave, rapidement : il a fait une superbe fin de course à pied il y a 2 ans ici, à Monterrey. Mais il avait dû être arrêté 2 jours avant. Donc autant dire qu'il a presque commencé la course à pied frais comme un gardon. Il a un temps de 2h35 au marathon, ce qui est bien mieux que Christian. Mais Christian allait plus vite que lui cet été à Lensahn. Bref, Dave est un bon coureur, mais il ne fait pas peur à Christian.

4 - et si Christian passe en tête ? Alors là c'est simple : il applique sa stratégie. Et c'est la même que quand il est à une autre position de course. Vous n'y croyez pas ? Allez relire son compte-rendu des 6 jours d'Antibes .

Et maintenant, les nouvelles fraîches du Jeudi

Beto et Roberto
Roberto, concurrent italien du double déca-ironman, et Beto "el que sabe todo" (celui qui sait tout)

Nous nous sommes réveillés à 4h, comme d'habitude. Dominique a dormi dehors : il ne supporte pas l'atmosphère confinée de la chambre (en bref : c'est une chambre normale, sauf qu'on ne peut pas ouvrir les fenêtres.) Mais la grande nouveauté du jour, c'est le petit déjeuner. Christian n'avait pas été très bien hier en début de journée. Alors ce coup-ci, j'ai amené dans la chambre deux bananes, des petits gâteaux et de l'eau. Un régal d'après Christian, un grand plus pour sa première heure de course.
Et l'autre nouveauté, c'est qu'il a enfilé trois cuissards les uns par dessus les autres, pour protéger ses fesses violettes.

Pour cette journée, Christian a un objectif SMART (Simple, Mesurable, Ambitieux, Réaliste et cadré dans le Temps ou Timé) : qu'il ne lui reste plus que 50 km à faire vendredi après son réveil.

Quand je le rejoins sur la piste, on parle de son écart avec Dave : seulement un tour. Ah, comprend Christian, ça explique pourquoi il s'est tellement accroché quand je l'ai doublé.

Et le voila parti pour une journée de plaisanteries. Incroyable, je l'ai rarement vu aussi constamment rigolo pendant toute une journée.

  • Il m'interpelle en passant devant les ravitos : Valérie, au prochain tour, je veux des goulouloux.
  • Il repasse en danseuse : Regarde quand je danse j'ai plus mal au cul !
  • C'est bientôt l'heure de sa pause : je tends 2 doigts pour signifier "2 tours". Il me répond par un poing fermé, en lançant : "Pierre, j'ai gagné contre les ciseaux !".
La piste
Le terrain de jeu, vu de nuit pour une fois. Là c'est la vue lors de la seule descente.

Et avec les autres c'est pareil : Wayne lui explique que si la tendinite peut être une raison valable d'abandonner (ça peut s'aggraver), l'ampoule par contre est un prétexte. Un instant plus tard, Christian prend un air grave : Wayne, je crois que je vais abandonner. Wayne est abasourdi. Christian continue : J'ai une ampoule. Wayne a failli en tomber de son vélo en s'esclaffant !

Heureusement, il n'en est rien. La femme de Wayne a dû le laisser, pour retourner travailler. Nous lui avons promis de nous occuper bien de son mari, jusqu'à l'arrivée d'un ami qui doit prendre le relais. Et il a besoin d'aide : je le trouve perplexe au ravito liquide : où est l'eau ? Eh oui, c'est les accompagnateurs qui savent que dans les cuves opaques de droite, c'est de l'eau, et dans celle de gauche seulement de la boisson énergétique.

Je ne vous ai pas beaucoup parlé des repas. Ce jeudi matin, c'est buñelos pour tous. Ce sont des galettes frites à la cannelle, délicieuses. Il paraît que le ravitaillement est meilleur que les années précédentes. En fait, après deux jours moyens, il a été décidé que la chef cuisinière pouvait faire les plats qui lui plaisaient. Résultat : pizzas, boulettes de mais, gratin de légumes, buñelos, tacos à la viande... Le ravitaillement est original ici, mais c'est parfait pour qui veut connaître la cuisine familiale mexicaine. Par contre, on ne sait jamais trop quand il y aura à manger. Je prépare une barquette d'avance dès que je découvre des trucs appétissants. Et je découvre le soir que l'accompagnateur de Dave fait comme moi, puisqu'il y a parfois vraiment rien à l'heure pile à laquelle nos athlètes font leur pause.

A 9h30, c'est la mi-course symbolique : Beat termine le quintuple ironman en première place. Deux personnes portent une banderole en travers de la piste, en prenant garde à ne pas tomber sur un moment où un cycliste passe. D'ailleurs, deux participants au déca préfèrent s'arrêter, pour féliciter le vainqueur.

A midi, ça devient sûr : le temps est plus frais qu'hier. Tant mieux pour les pieds, qui macèrent moins. Et pour les fesses : si les pieds sont capables d'appuyer plus, ça soulage le postérieur.

Nuit en ponchos
Les nuits sont fraîches et les ponchos offerts avant course sont bienvenus. Ici, l'accompagnateur de Daniel et la sœur de Roger.

Par contre, les mauvaises nouvelles s'accumulent dans l'organisation de la course. Il devrait y avoir un médecin. Il n'y en a pas. Les concurrents doivent faire un check-up chaque jour. Christian, qui aime la régularité, a choisi d'y aller a 11h à chaque fois. Personne a 11h. Je lui dis que je le préviendrai quand le médecin arrivera. Je le préviens a 19h que le médecin devrait arriver à 20h. Et finalement, les check-ups ne commencent qu'à 21h30. Avec un médecin lent comme tout, et qui nous demande si vraiment on a fait les précédents parce qu'il n'a pas la fiche. Fiche qui était directement saisie à l'ordinateur par les précédents, mais celui-ci n'a pas d'ordi.

L'affichage des kilométrages lui non plus n'est plus disponible. Le PC a planté. Les bips se font entendre à chaque tour, on nous promet que la machine fonctionne et que tous les tours faits pendant cette période seront comptés et vérifiés. Mais on n'a plus idée de son avancement. Dominique s'arrête plusieurs fois pour voir son kilométrage. Je dois vraiment être ferme sur le fait que je le préviendrai quand le système remarchera pour qu'il arrête de perdre ce temps aussi gratuitement.

L'homme à l'ordinateur est un nouveau. On a un mal fou à en tirer quelque chose. Il nous met même, sur l'écran de contrôle, l'affichage de la page internet alors qu'on a normalement un écran bien plus pratique. C'est moi, qui ai vu Carlos maniper, qui lui remets, en insistant pas mal, l'écran que les autres accompagnateurs lui demandent avec force depuis plusieurs minutes. Mais toujours pas d'update du kilométrage.

La mise à jour kilométrique est tombée en panne vers 9h30. On attend. Andonie n'est pas là. Finalement, Carlos, qui était au travail (il est employé dans une banque), revient à 11h30 pour réparer le bousin. Si j'ai bien suivi, il suffisait de rebooter... Résultat des courses : personne à midi ne croit plus à son kilométrage. Vincenzo fait même un réclamation argumentée, son compteur de vélo à la main. Il lui manquerait 7 tours. Il faut téléphoner à Andonie pour régler cela.

Beto pendant ce temps est mis à l'épreuve. Puisque c'est toujours lui qui aide les concurrents, tout le monde l'assaille de questions. "Super Beto, el que sabe todo", comme l'appelle Roberto, ne sait pourtant pas ce coup-ci. Il me dit : OK, mais moi je ne m'y connais pas en médecine, ni dans les systèmes informatiques ! Je lui dit que si c'est comme cela, je l'écrirai sur Internet. Vengeance est faite! (clin d'œil)

L'après-midi commence donc avec à nouveau le comptage, mais sans médecin. Et bien sûr avec une douleur fessière constante et partagée. Christian a du mal à décoller ses fesses de la selle. Roger est amusant : il lève toujours les fesses un instant : de son stand à l'arche avec les bips. Soulagement de 3s par tour.

A 16h, Dominique remarque que les tentes officielles ont été bâchées, pour faire des murs. "Demande s'il va pleuvoir, Valérie" Super Beto le sait : c'est non, il va juste faire froid cette nuit. D'ailleurs il fait moins chaud déjà maintenant, et nous reportons l'idée de la tournée de glaces (voir hier) pour un jour plus approprié. Dominique découvre quand même la baraque, alors je lui en paye une.
Avant la nuit, je vais chercher nos blousons. Mais finalement, c'est une nuit fraîche, mais similaire aux précédentes.

A 18h, ça y est, la blessure est arrivée. Dominique a mal au genou et bêtement c'est justement pas à celui qui lui faisait peur avant le départ. Il n'y a pas de médecin. Il me demande de demander à Beto s'il y a un kiné. Il n'imagine pas une si grosse course sans kiné. Il n'y a pas de kiné, on verra avec le médecin, il doit arriver à 20h. Ce sont donc 2h sans pédaler à prévoir ! Je lui dis que c'est vraiment le moment de dormir pour gagner de l'énergie pour la nuit, mais justement, il n'est pas fatigué, là ! Il insiste, si Beto dit qu'il n'y a pas de kiné, il faut aller voir Andonie, qui est justement là. Andonie a la même réponse. Dominique a quand même du mal à y croire.
Pendant que je m'occupe de Christian, il discute autour de lui. Eileen, la concurrente féminine du double, lui offre un espoir : sa soeur Katleen est masseuse. Mais elle dort. Je dois me tenir prête pour faire l'interprète. Katleen arrive avant le médecin, vers 19h30. Enfin ! Je commence à expliquer à l'un ce que dit l'autre, je la regarde masser Dominique. Elle explique : "Il faudrait peut-être demander à ma sœur Eileen, c'est elle qui s'y connaît le mieux car elle est docteur chiropracticienne." Ça en jette, même si je ne sais pas exactement quelle fonction cela recouvre. Par contre Dominique est perplexe : c'est Eileen qui l'a envoyé vers Katleen. Oui, explique Katleen, mais Eileen est dans sa course, et son temps de repos, elle se le garde pour se reposer. Malgré tout, elle finit par aller demander conseil à Eileen, qui nous explique tout en anglais sur les muscles croisés des cuisses qui sont accrochés aux genoux. Je traduis, sauf les termes techniques que je remplace soigneusement par des termes vagues comme "le muscle, là" ou "un truc". Une heure de massages, glaçage, explications. Dominique finit par repartir à vélo, mais il a mal.
Le médecin n'est toujours pas là, il arrivera 1/2h plus tard. Au check-up, il donnera de vagues conseils à Dominique : avant tout mettre de la crème anti-douleur comme celle qu'il a appliquée toute l'après-midi.

Christian pendant ce temps arrive à son objectif. Nous allons nous coucher avec 1762 km au compteur vélo. Il en reste 38 à faire. Christian ne veut pas les faire car il préfère commencer la course à pied de jour. Et puis, il n'est pas encore temps de sucrer ses heures de sommeil prévues. Nous partons vers la chambre à 1h du matin, comme d'habitude. Dave, à qui il ne reste que 20 km, reste sur la piste et tient à les faire avant de dormir.

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Mis à jour le Wednesday 01 December 2010.