CR Ultrathlétic Ardèche, édition zéro

Mais qu'est-ce que je fous là ?

Tout à commencé par un mail de Gégé, en gros il cherchait des p'tits gars et filles sympas disposé(e)s à rajouter un petit 200 bornes, comme ça l'air de rien, dans leur saison, histoire de voir si son projet de course "Ultrathétic Ardèche" était viable. Il co-organise avec un autre Gégé, Ségui celui-là. Comme ça c'est bien le foutoir, quand on te dit "t'as qu'à demander à Gégé" on sait jamais de qui ça parle. Mais moi j'aime bien les duos efficaces comme ceux-ci, façon Tic et Tac. Et puis ça m'a amusé, alors j'ai dit oui. Et puis ça avait intérêt à être bien car à cause de ça j'ai loupé l'anniversaire des 10 ans de ma boîte avec week-end en bord de mer, champagne et tout le toutim.

La fine équipe
Une moyenne d'environ un bénévole / assistant par coureur, si le luxe existe, c'est bien ici, en Ardèche !

Du coup, on se retrouve à 9, soit 3 groupes de 3, au départ sur le pied de guerre devant la mairie, sur le coup de 6 heures du matin. Je suis avec Dominique et Patrice, que je ne connais pas du tout. Eux se connaissent, mais je ne doute pas que je vais pouvoir causer un brin, je ne connais pas un type qui fasse 200 bornes comme ça par plaisir et qui n'ait pas une histoire intéressante à raconter. Cherchez pas, ça n'existe pas. Bon tiens d'ailleurs j'apprends très rapidement eux aussi participent à la Transpy en juillet. Le monde est petit.

Vroup, départ sur des chapeaux de roue. Si j'avais été tout seul je serais peut-être parti un soupçon moins fort. Mais bon c'est quand même plus pratique pour tout le monde si on reste groupés. Donc je colle aux deux autres. De toutes façons mon rythme "naturel" d'alternance course/marche est insuivable et très personnel, donc vaut mieux pour tout le monde que je me cale sur les autres et pas l'inverse. Je ne suis pas non plus né de la dernière pluie, je sais qu'ils vont ralentir, si on continuait comme ça on bouclerait le machin en 22h, et "hors compétition" ça me paraît compliqué et peu vraisemblable.

Je note un très joli point de vue pour faire des photos, au premier virage après le point, y'a Privas en arrière plan, c'est juste splen-dide.

Gégémobile
Gérard Cain va nous suivre pendant ces 200 bornes. Les deux autres groupes auront aussi chacun leur charette dédiée. Mais nous, on a la Gégémobile, la seule, l'unique !

Bon alors, message à ceux qui veulent s'inscrire. C'est 202k (ou 205, on va pas chipoter, ça dépendra des variantes finales), avec, sur le papier 3500D+. Mon GPS a mesuré moins mais de toutes façons c'est plus de 3000.

Donc : si votre but est de faire un 200 à peu de frais, de découvrir la distance, tout ça tout ça, à mon avis, c'est la mauvaise adresse. C'est l'Ultra *ATHLÉTIC* Ardèche. C'est pas une promenade de santé dans un fond de vallée bien plate. Faut pas non plus paniquer, ça reste de la route, la plupart des côtes ont une pente de 4% à 5%, très raisonnable, et on peut très souvent courir les montées si on le souhaite. Mais tout de même, vous en aurez pour votre argent, ce sont de vrais kilomètres, qui se méritent.

Et puis c'est beau, sauvage et tout. C'est un peu tous les avantages du trail (la belle vue, la solitude avec la nature tout ça tout ça) sans les inconvénients type "je risque de péter la cheville au prochain lacet". Sans rire, je trouve que c'est un très bon compromis. Joli, charmant et nature, avec le confort du bitume. Bon si vous êtes allergique au macadam tant pis, mais si vous le tolérez, vous allez a-do-rer.

Attention à votre gestion de course, les 70 premiers kilos sont, hum, comment dirais-je, "engagés". En gros sur la première boucle il n'y a que deux bosses, mais ce sont de belles bêtes. Et la deuxième boucle commence par une bonne rampe de 10 bornes. Faut pas se griller quoi. Après c'est plus cool, il reste deux ou trois difficultés, mais il y a du plat. Alors que du 0 au 70, du plat, ben y'en n'a pas.

Up
L'Ultrathlétic Ardèche, ça monte.

Et donc, faut aimer les grands bouts de route tout seul, sans traverser de grosse agglomération. Il y a bien une petite bourgage de temps en temps, un camping et des bungalows, mais quand même, dans l'ensemble, le paradis des coureurs autonomes.

Les ravitaillements tous les 10 bornes environ, c'est bien, mais faut penser à remplir sa gourde. Moi finalement je l'ai paradoxalement peu remplie, car il faisait plutôt humide et froid donc on buvait peu et boire aux checkpoints me suffisait. Mais une ou deux fois, notemment sur des tronçons la nuit qui ont duré longtemps parce que j'ai marché, eh bien heureusement que je l'avais, ma gourdasse.

Down
L'Ultrathlétic Ardèche, ça descend. Noter ma foulée typique, attaque franche et nette du talon. Et tant pis pour les minimalistes et les forefoot runners.

Petite remarque que j'ai faite à Gégé (je vous dirait pas lequel, nananananèèèreu), il y a 3 ou 4 dos d'âne un peu piégeux en sortant de Mirabel, dans la descente. Même en prévenant mes compagnons de route, ils ont failli trébucher dessus (aucun marquage). Pas très malin de la part de la DDE, si on les voit pas on ralentit pas, juste on nique les amortisseurs de sa bagnole et on risque une perte de contrôle du véhicule. Et à pied on a une chance non nulle de se râper les genoux mignon mignon avant la tombée de la nuit.

La tombée de la nuit, parlons-en. Un relai un peu long avant la montée sur la grotte machin-chose (mais Gégé va le raccourcir, il nous l'a promis) et puis là Patrice nous pique un coup de mou. Bah alors, un grand gaillard comme lui, qu'a fait des prouesses dans le désert et tout le bazar, c'est étrange. À mon avis c'est juste une baisse de forme passagère, un bon litron de breuvage sucré, une tape dans le dos, un coup de pied au cul et il va repartir, c'est certain. On essaye, avec Dominique, de le convaincre, mais non, il préfère arrêter là. Bon, en même temps c'est vrai que ça ressemble à rien de se mettre la misère, c'est un Off entre amis, pas une compétition acharnée.

Je reste donc seul avec Dominique. Il fait nuit. Bon on a quand même beaucoup marché du coup j'ai plutôt la bonne patate. Il fait nuit. J'ai pas énormément dormi la nuit dernière car j'étais en train de finir mon roman de Terry Pratchett en douce, dans mon duvet (la liseuse électronique à rétro-éclairage, c'est le pied). Mais je ne sens pas trop la fatigue. Je crois qu'à force de faire des 6 jours et compagnie, je finis par mieux tenir les nuits blanches. L'âge aussi joue, je pense. Enfin bref, j'ai du bon jus bien dispo, je ne fais pas d'étincelles, mais j'avance bien. Dominique est toujours un peu vite pour moi mais pas grave, je reste en retrait de quelques mètres.

On loupe Pont d'Arc, enfin je veux dire, on y est passé, mais il fait nuit et sombre, nuages et tout le bazar, on ne voit rien du tout. D'un autre côté c'est bien de passer ici de nuit, parce que la route des Gorges de l'Ardèche un week-end où il fait beau, en journée, non merci, le cocktail motards & camping-cars, très peu pour moi. À mon avis à part les tous tous premiers, tout le monde va passer ici de nuit.

Et puis Dominique nous fait un coup de calgon, le même que Patrice, mais version Dominique (juste le prénom à changer). Bon là ça a l'air tout de même plus sérieux, il a vraiment super mal au genoux, boîte et tout et tout. Encore une fois, on n'est pas là pour se défoncer, c'est du plaisir pour voir si le parcours est bien, on va pas pousser mémé dans les orties.

Avec ces histoires, je me retrouve seul. Cela ne m'inquiète pas trop, je suis bien équipé et puis avec la voiture qui m'attend tous les 10 bornes, c'est juste royal. Je suis adepte des sorties solo où "la nuit tu t'démerdes avec c'que t'as sur toi" et là ça peut parfois être compliqué de porter sur soi de quoi tenir 10 heures, mais là le pire qui peut arriver, c'est deux heures. En général je mets environ 1h30 à ce stade, c'est tout à fait gérable. J'ai le parcours sur le Garmin au cas où (pratique quand même pour se rassurer que oui, on marche sur la bonne route).

Ce fond de vallée (vallée de l'Ibis je crois, de mémoire) est très joli, on en a beaucoup profité à l'aller, mais là la nuit c'est sûr, c'est moins typique. Je trotte et ne marche pas de trop, histoire de bien rester réveiller. Sans trop en faire non plus. Mon p'tit rythme quoi.

Au point de contrôle suivant (le 140, un gros) v'la t'y pas qui sont tous en train de dormir dans la tire à Dédé, pardon, à Gégé. Je cogne au carreau. Et là tout s'active. Saucisson, soupe, café, chips, sandwichs, quatre-quart, y'a tout. Si y'a un type à qui on peut faire confiance pour les ravitos, c'est gégé. Aurélie est adorable, aux petits soins avec moi, franchement, je suis comme un coq en pâte.

Et puis Patrice décide de reprendre du service. Ah, ça, c'est une bonne nouvelle.

Du coup nous sommes deux, à nouveau. Cela confirme mon analyse de tout à l'heure, juste un petit coup de mou passagé parce que probablement, nous sommes partis un peu fort. Bon bref, on s'en fout.

Ooon n'est pas fatigués...
...vouuus êtes fatigués. Les accompagnateurs aussi, ont pris cher. Ici Gérard Ségui tente de se refaire une santé.

Tiens finalement, je suis fatigué dis-donc. Je déballe mon stock de blagues pourries (et j'ai un p*tain de stock de blagues pourries) pour meubler la nuit. Et Patrice se prend au jeu. Ah, les aventures de Maurice et Bernadette, j'en ai encore la larme à l'oeil tiens, on s'est franchement bien poilés.

Et puis deux CP plus loin, vous savez quoi ? Dominique, lui aussi, réintègre le groupe. Il reste 20 bornes, une paille.

La der des der
Descente finale sur Privas, avec Patrice. Aouch' ça pique au niveau des quadris.

Mais alors, et c'est là qu'il vaut mieux être prévenu, les derniers 20 km sont, comment dirais-je, de toute beauté.

En gros du 180 au 190 on monte vers le haut du plateau qui domine Privas, pour atterir dans un joli champ d'Éoliennes. Sur le principe, rien de grave, c'est la dernière montée, on se fouette un peu et on n'en parle plus, voyez le principe. Mais oui mais non, parce que bon, OK hier on a heu du soleil de la pluie, un peu toutes les météos possibles, c'était marrant.

La quille
Allez, 10 mètres et c'est plié. On y croit !

Mais là boudiou il souffle un vent à décorner les boeufs, un truc de malade. Je suis plutôt lourd pour un coureur (82kg en ce moment, pour 1m82) et j'ai sur moi un petit sac à dos et plein de vêtements trempés de sueur qui n'allègent pas le bonhomme. Mais j'arrive tout de même à être déstabilisé par les rafales. Wow, ça décoiffe. Et puis il fait chaud, mais sans plus. En haut doit y avoir 3 ou 4 degrés, j'en veux pour preuve que de la neige se colle sur mon collant. Oui oui, des flocons, un 1er mai, tout est normal, ça se reconnaît bien des flocons blancs sur un collant noir.

Par chance (enfin, pas que) j'ai investi en 2014, pour le Tor des Géants dans une veste en Gore-Tex toutes options, qui ne paye pas de mine mais s'avère être une véritable armure dans ce genre de temps. Le vent *ne la traverse pas*. Point final.

Et hop.
Voilà, c'est fini. 200k et des patates avec un dénivelé positif dans les 3000m, en un soupçon moins de 28h. Verdict : la course est faisable, c'est bon, vous pouvez servir !

Le pied. J'ai juste enfilé un bon débardeur en polaire en-dessous, chopé des gants longs, sorti la capuche, et roule Marcel, je pourrais presque en rigoler de ce mauvais temps.

Je crois que je me marre. Dominique a remarqué hier, parfois je rigole tout seul comme un débile. En fait je crois que juste, j'aime bien ça, courir et marcher très longtemps, c'est mon plaisir, mon petit péché mignon.

Pendant ce temps là...
...les autres sont encore au turbin. Mais l'arrivée n'est pas loin, courage les amis.

La mécanique coince tout de même un peu. Dans la dernière descente je me force à trotiner (on a beaucoup marché sur le plateau dans le froid) histoire d'arriver le plus vite possible, sans toutefois me faire mal, c'est pas le tout mais je ne serais pas contre une bonne chaise, et ensuite une bonne douche. Que des bons trucs quoi.

Et en perdant de l'altitude, ça se réchauffe, je transpire et suis dans mon jus, bon sang quel beau sport, on pue ça gratte dans le dos, mais qu'est-ce que c'est bon, on en redemanderait dites-donc.

Tout est bien...
...qui finit bien. Quelques bobos en route, mais dans l'ensemble, bilan positif. Heu-reux.

Juste une petite remarque sur la descente : c'est une vraie boucherie. Genre, raide. Gégé nous a raconté que certains passages étaient à 15%. Bon c'est peut-être exagéré, mais 10% ils y sont, c'est sûr. Donc imaginez, vous avez 190 bornes dans le gilet, donc les quadris ruinés, et là, surpriiiise, ça descend bien dur bien méchant, la bonne vieille cerise sur le bon gros gâteau quoi.

Et puis après, y'a la petite touche de crème sur la cerise, ça remonte pendant 500 mètres dans Privas pour rejoindre la ligne d'arrivée. Juste pour vérifier si vous montez toujours bien. À ce tarif là on aurait aussi pu rajouter un petit tour du circuit des 6 jours de France on passe juste à côté. Franchement, tant qu'à passer dans le coin ;)

Tout ça pour dire que, ceux qui vont vouloir jouer la gagne, bah le classement au km 180 sera purement indicatif. Parce que du 180 au 200, y'a de quoi s'amuser pour de vrai. Moi je l'adore ce finish, suis fan, au moins on ne se déplace pas pour rien. Et pour ceux qui veulent "juste finir", ben suffit de marcher et d'être bien patient ;)

Au final ? Un bilan largement positif.

  • méfiez-vous de la météo, là il a fait plutôt froid, mais avec 28 degrés et un gros cagnard, ç'aurait pas été beaucoup plus simple ;
  • sans dramatiser, préparez-vous bien, c'est un vrai 200 bornes, pas un produit au rabais ;
  • un ravito tous les 10 kilos, c'est largement suffisant, mais une petite réserve d'eau est absolument indispensable ;
  • attention aux 70 premiers kilos et aux 20 derniers, facile de se griller sur les premiers, facile de ruiner son chrono sur les derniers ;
  • accrochez-vous entre le 110 et le 130, il y a une petite difficulté, la lassitude va vous choper (c'est là que Patrice et Dominique ont coincé, doit bien y avoir une raison), mais il faut tenir, le jeu en vaut la chandelle ;
  • viendez nombreux !
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Mis à jour le vendredi 06 mai 2016.