L'allaitement de Lise

J'aurais souhaité allaiter Lise au moins 4 mois et demi. Elle est née en avril et mon voeu était de l'allaiter pendant le mois d'août, en vacances. Je reprenais le travail début juillet, il fallait donc que je tire mon lait un mois et ensuite, à nous la belle vie au sein au mois d'août !

Facile, me disais-je. Allaiter Adèle, j'avais su faire, malgré des débuts difficiles . Alors pour Lise, c'est bon, je maitrisais les pièges.

Et effectivement, les débuts de l'allaitement se sont très bien passés. J'ai positionné Lise correctement dès le début. Elle était bien, mon lait est venu rapidement. Elle s'est mise à grossir, nous avons quitté la maternité.

Adèle n'était pas toujours enthousiasmée de voir ce bébé sur mon sein. Elle n'avait que 15 mois, m'aurait voulue pour elle seule. Mais je me mettais sur le canapé avec Lise et Adèle n'arrivait pas à embêter sa soeur.

Lise n'a jamais été une grosse téteuse. Dès le début, elle pouvait tenir plusieurs heures sans réclamer de lait. Etonnament, je pouvais également la porter sans qu'elle cherche systématiquement mon sein. J'étais surprise : 8 à 10 tétées par jour, ça me paraissait peu. Au bout d'une semaine à la maison, ce fut la panique ! Nous sommes allés peser notre bébé à la PMI. Elle avait grossi mais la courbe s'était infléchie ! Christian a tenté de me rassurer : d'après la puéricultrice, il n'y avait pas de souci à se faire mais il fallait surveiller la croissance de la petite, et puis elle avait l'air en forme, non ? Si...

Malgré tout, il m'a fallu téléphoner à notre pédiatre. Sur un ton gentiment moqueur elle m'a dit "Pas vous, madame Mauduit !" et c'est ce que j'avais besoin d'entendre. Lise n'avait aucun des signes de l'enfant sous-alimenté ou déshydraté : la peau non élastique, le caractère amorphe... Nous avons donc décidé d'arrêter simplement de peser Lise toutes les semaines. Elle serait pesée lors de son examen d'un mois. Et j'ai aussi arrêté de compter les tétées, si peu nombreuses.

Et Lise buvait et grossissait. Et je restais surprise par son peu d'appétit.

Malgré tout, l'inquiétude restait. Lise a commencé par ne plus aimer la tétée du soir. J'essayais un sein, l'autre, elle n'en voulait pas. Et moins elle en voulait, plus je souhaitais cette tétées. C'était celle d'avant la nuit et je voulais tellement qu'elle dorme longtemps. D'ailleurs, elle dormait longtemps. Mais chaque dîner abrégé me faisait craindre un réveil en pleine nuit.

En apparté : on m'a donné toutes sortes de conseils pour que mes filles fassent leurs nuits, parmi lesquels un fréquent : il faut leur donner une farine pour épaissir le repas du soir et faire tenir le bébé. Comme je ne sais pas faire un sein à la farine, je n'ai pas appliqué. Et Lise comme Adèle a dormi des nuits complètes avant de manger quoi que ce soit d'autre que mon lait.

Une fois l'allaitement bien mis en place, j'ai donc toujours ressenti un manque de goût de Lise pour mes seins, peut-être un manque de lait. Je n'avais jamais d'engorgement et ça me manquait. Mes seins étaient trop souples, trop petits. A part Christian, personne ne me comprenait bien. Mes seins étaient objectivement plus gros qu'avant, Lise était en bonne santé. Et moi, je me sentais mal et Lise ne me réclamait pas assez. A deux mois et demi, elle ne faisait déjà que 4 à 5 repas par jour. A 3 mois, 3 repas par jour lui suffisaient. Nous lui en proposions quatre en sachant pertinamment qu'il y en aurait un qu'elle refuserait.

Mais j'étais toujours décidée à continuer à l'allaiter.

Il fallait donc que je tire mon lait. J'ai commencé avec un appareil manuel. Impossible de s'y mettre, je n'avais presque rien dans le biberon. Et je me souvenais tout ce que j'arrivais à tirer pour le jeter à l'époque d'Adèle, uniquement parce que j'avais les seins trop tendus ! J'ai persévéré. Un biberon fut prêt. Comment Lise l'a-t-elle pris ? Sans problème, dans mes bras. Très bien, mais hors de question pour moi de poursuivre l'expérience, je la sentais à deux doigts de préférer le biberon au sein.

J'ai tout de même loué un tire-lait électrique parce qu'avec le manuel, je n'étais pas douée. Et c'est vrai que c'était plus facile. Malgré tout, la période d'adaptation de Lise fut un esclavage pour moi. Je passais tout le temps loin d'elle avec cet embout sur un sein, le tire-lait manuel sur l'autre... Et je n'arrivais pas à mettre suffisamment de lait d'avance pour la nourrice !

J'ai trimballé le tire-lait au travail, fait des pauses à l'infirmerie. Je me sentais vache à lait. Mais mauvaise vache à lait. Le stock si difficilement emmagasiné s'amenuisait. Il fallait tenir. Encore trois semaines, deux semaines... Un jour, je n'ai fourni à la nourrice que deux biberons pour la journée. Elle lui a donné un biberon de lait maternisé au goûter. Et le verdict est tombé : << J'ai l'impression qu'elle préfère le lait en poudre. >> Malheureusement, c'était mon impression aussi, depuisqu'elle en avait bu, une fois avec sa grand-mère, une fois avec son père. Son père qui essayait de me rassurer : peut-être était-ce tombé à un moment de pic d'appétit ? En tout cas, on ne pouvait pas dire qu'elle n'aimait pas téter le sein.

Et en effet, Lise n'a pas fait de confusion sein-tétine. Elle aimait le sein. Mais son lait préféré, c'était le M*** en poudre ! Celui de Maman ? A la rigueur, s'il n'y a que ça.

Bref, vers le 20 juillet, je pris la décision d'arrêter ces heures d'esclavage à la tireuse. Ce n'était pas possible de tenir jusqu'au mois d'août, Lise n'y tenait pas. Et je restai avec ce goût d'échec en bouche, malgré ma petite fille en bonne santé et souriante, mais trop facile à vivre.

Au mois d'août, nous avons connu toutes les galères du biberon à préparer en ballade. Heureusement, Lise était patiente pendant la préparation. Et il nous restait les gros câlins.

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Mis à jour le dimanche 28 octobre 2007.