A 79 ans, il est revenu sur la boucle. Deux ans qu'il n'avait pas réussi à la maîtriser. L'an dernier, il n'avait même pas tenté. Mais non, ce n'était pas possible de s'arrêter ainsi. M Janvier est de retour. Il marche, inlassablement. On le double, souvent. Piero, c'est presque à chaque tour. Un encouragement, un sourire, le voilà déjà passé. Un mot d'italien avec les gazelles italiennes. Quelques minutes de papotage avec Gérard, parfois. Pascale, l'informaticienne, garde sa belle foulée.
Il pleut. Il ne voit pas grand chose. Le soleil se lèvera-t-il ? En route vers le point du jour. Depuis des heures, M Janvier marche. Il connaît bien cette boucle d'un kilomètre, dans le parc Mistral, à Grenoble. Contourner les gradins, traverser le parking, longer l'avenue, immeuble gris aux balcons multicolores, prendre l'allée entre les pelouses, la Halle des Sports à droite, entrer dans l'anneau de vitesse, puis contourner les gradins, cent fois, et encore. Hier, des enfants apprenaient à faire du vélo sans roulettes et les amoureux s'embrassaient dans le parc. Le soir, un groupe d'adolescents mangeait des pizzas en riant de ces fous, si lents, si drôles. Dix-huit heures, maintenant, que M Janvier avance. Le soleil pas encore levé. Il n'y a plus personne dans le parc Mistral. Que sa femme assise sur une chaise en plastique, lui offrant sourires et friandises mouillés. Et une quarantaine de coureurs et de marcheurs. Piro, Pascale, Gérard, Florence, Bernd, Maria. Pas des fous, non. Une société en miniature. Qui avance.