CR, 200 km en tandem avec Jean-Claude Perronnet

9 août 2014

Connaissez-vous Jean-Claude? Moi-même je ne le connaissais pas avant de courir des 100 km ou des 24 heures. Mais une fois qu'on est dans le circuit, difficile de le rater, il est dans tous les bons coups. Vous pouvez lire son blog. Il a une marque sur 100 bornes à 8h41 (!) soit presque 12 km/h de moyenne, une marque sur 24h à 212 km (!) ce qui le place dans le peloton des gros mordus, ceux qui courent pour le plaisir mais aussi pour aller tâter la limite, voir où elle se trouve. J'ai connu Jean-Claude aux 6 jours du Luc en 2013 , au cours desquels j'ai eu le plaisir de l'accompagner. Car il faut l'accompagner. Il est non-voyant.

Jean-Claude Perronnet
L'homme qui court avec les yeus des autres. Jacques Flament édition. ISBN 978-2-36336-126-4.

Or donc, après avoir lu son livre (ISBN 978-2-36336-126-4), je me suis dit que peut-être, ça pourrait l'intéresser qu'on fasse un tour ensemble. Vu que, j'ai un tandem, et que j'aime rouler avec, et que Jean-Claude est sympa.

Le parcours

J'ai fait simple : un bon vieux brevet 200k dans la région de Dijon, on ne l'a pas fait le jour du brevet donc ce dernier n'est pas validé mais on s'en fout complètement, le but était de passer un bon moment ludique et sportif. J'ai donc pioché sur le calendrier perpétuel un parcours au départ de Varois et Chaignot.

200k Varois et Chaignot
Le parcours du brevet 200k de Varois et Chaignot, que nous avons décidé de suivre, en dehors de toute organisation officielle, juste pour le plaisir de rouler.

Niveau logistique : j'arrive le matin de bonheur avec le tandem sur la galerie, on roule la journée, je rentre le soir, comme ça on ne perd pas de temps.

Le matériel

Énorme galère de mon côté sur la préparation du tandem. J'avais réutilisé pas mal des pièces dessus sur un autre vélo, il a ainsi fallu que je rechange tout. Parmi les changements un peu structurants, j'ai remplacé la fourche suspendue par une rigide, le tandem est une base VTT c'est bien c'est costaud mais la fourche suspendue c'est inutile voire néfaste pour la route. Le contrôle est moins bon, ça pompe, bref, c'est nul.

Donc, je perds déjà du temps à faire ce changement,

Et puis il y a le frein. Freins à disque, à l'avant et à l'arrière. Sauf qu'en fait ils sont assez puissants et en pratique le frein avant me suffit quasiment. Du coup par flemme j'ai laissé le frein arrière monté... sur le guidon arrière, ce qui permet au passager de freiner s'il voit un danger que je n'ai pas vu, et puis ça m'évitait de devoir rallonger la durite de frein.

Tandem v2.0
Le tandem armé jusqu'aux dents prêt à bondir, avec tout qui marche. Ou presque. Enfin, il roule.

Sauf que Jean-Claude ne risque pas de voir des dangers que je n'ai pas vus, donc il faut impérativement que j'aie les deux commandes à l'avant. Et là, galère. J'ai historiquement choisi d'équiper le tandem de freins à disque Hope de 200mm, des trucs de descente, qui freinent super de chez super, mais sont tout sauf standard. J'ai commandé sur Internet la durite longue pour aller de l'avant à l'arrière *même sur un tandem*, du liquide DOT, je m'apprête a maniper et m'aperçoit qu'en fait il faut un kit spécial, des seringues, tout un merdier dont j'ignorais jusqu'à l'existence. J'achète en extrême urgence un kit de purge sur le web (parce que bon, les vélocistes ouverts au mois d'août, même à Paris, on fait vite le tour...) avec livraison express. Je m'aperçois que ce kit est tout sauf universel, les diamètres ne sont pas adaptés, ça bave de partout, il y a du DOT 5.1 plein ma terrasse, c'est armageddon mais... à 2h00 du matin j'ai fini la bricole, la purge est faite.

Et bonne nouvelle, ça freine très bien.

Départ

Déjà, j'arrive en retard. Il m'a fallu des plombes pour monter le tandem seul sur la galerie, à 5h00 du matin. Je préviens Jean-Claude, qui, pas chiant, comprend et s'adapte. On fera vraisemblablement la fin du parcours de nuit, mais pour ce que ça change, ce n'est pas bien grave.

Le départ, en tandem, c'est toujours un événement. Surtout quand, comme moi, on fait du tandem tous les trois ans. Jean-Claude s'installe à l'arrière. On révise un peu le clips des cales automatiques. Vaut mieux maîtriser un peu le bazard avant de rouler, sait-on jamais.

Je remplis les sacoches avec mon bordel - j'emmène du manger, du à boire, et pas mal d'outils, sait-on jamais - et la banane de Jean-Claude, et puis c'est le grand moment.

1... 2... 3... c'est parti mon canard ! Et ça roule tout seul. Jean-Claude est le passager modèle, son handicap doit le pousser à écouter et sentir davantage les mouvements de la machine, en tout état de cause, c'est transparent, et rouler est un plaisir.

Match aller

Le parcours est vaguement vallonné. Ceux qui connaissent un peu la Côte d'Or savent de quoi je parle. Le ratio est de 1%, à savoir 2000 mètres de dénivellé pour notre ballade de 200k. C'est assez standard, c'est le même qu'à Paris-Brest-Paris. Sans être de la montagne, cela reste assez relevé, il faut savoir monter.

J'essaye de décrire un peu le parcours à Jean-Claude, on plaisante un peu - je le vanne sur un mode "hé dis-donc, toi qui connais la région, tu pourrais nous guider un peu quand même!" - et dans l'ensemble ça se passe bien.

Nous serpentons assez longuement le long d'un petit cours d'eau, à l'ombre d'une sympathique forêt, c'est très plaisant. Je goûte moins les grands plateaux venteux, d'autant que le temps s'annonce orageux, et avec le jour maintenant bien levé, ça cogne presque dur.

Nous nous arrêtons dans une petite bourgade pour casser la croûte. Je vais faire le plein au bistrot et à la boulangerie (la meilleure combinaison possible) et constate que les clients du bistrot, et peut-être bien même le patron, ne boivent pas que de l'eau, et ce dès 11h00 du matin. Ils sont toutefois plutôt sympa, et n'en reviennent pas lorsqu'ils réalisent que pendant qu'ils s'arsouillent au comptoir, Jean-Claude pédale sans moufter.

Match retour

Je crains que nous nous fassions rattraper par l'orage. Le temps a fraîchit. Moi je vois les nuages noirs qui se rapprochent, Jean-Claude lui, sent le climat qui change. Dans les deux cas, le constat est partagé : il vaut mieux ne pas traînasser ou on va finir trempés vite-fait bien fait.

En attendant, nous profitons de l'instant présent. Jean-Claude arrive à deviner, je ne sais par quel miracle, que la voiture qui vient de nous dépasser tractait une remorque. Wow.

Fine équipe
Sur le chemin du retour, petite photo bucolique avant que l'orage ne nous trempe jusqu'aux os.

Nous prenons une photo sur un petit pont tout mignon, puis repartons sans traîner, décidément, cette pluie menaçante m'inquiète. Jusqu'ici, nous avons plutôt bien roulé. Sans surprise, dès que ça monte, on accuse un peu le coup (jamais facile à deux sur le même vélo) mais globalement, ça roule pas mal.

Et puis ce qui devait arriver arriva : la pluie. Suivi de près par l'autre truc hyper sympa en vélo : la nuit.

Nous voici donc dans la dernière ligne droite, sous des seaux d'eau, dans le noir. Moi, je suis victime d'un truc qui m'arrive souvent dans ce genre de situation : la pluie fait couler dans mes yeux toute la transpiration accumulée pendant la chaleur de l'après-midi. Et la sueur qui coule dans les yeux, ça pique. Ainsi, je dois m'arrêter à intervalles très réguliers, rapprochés, pour m'essuyer les yeux, car raisonnablement, je ne peux pas piloter les yeux fermés.

Jean-Claude supporte sans broncher mes arrêts répétés, ça doit être assez insupportable je pense. Je négocie une descente sous la pluie battante, les yeux mi-clos, dans le noir, avec quelques lacets. Oh la la, il est temps que ceci se termine.

La vengeance de la mécanique

À quelques kilomètres de l'arrivée, lors du franchissement d'une route un peu plus fréquentée que les autres, nous sommes victimes d'un accès de précipitation et patatras, la chaîne intermédiaire - celle qui relie les deux pédaliers - saute.

Aïe caramba, qu'à cela ne tienne, nous stoppons la machine, et je remets la chaîne en place. Nous repartons. Jean-Claude trouve qu'il est étrange que je parte avec le pédalier dans une position bizarre, nous nous étions mis d'accord pour que ce soit la pédale droite en haut, et pas autrement. Je lui rétorque que si, je suis d'accord, et c'est bien ce que je fais jusqu'à ce que je réalise que... bon sang de bois, en remontant la chaîne, j'ai décalé les deux pédaliers.

Re-belote, je défais la chaîne et la repositionne à nouveau, en prenant garde à bien synchroniser l'avant et l'arrière cette fois.

Retour au bercail

Tandem familial, le retour
Grâce à Jean-Claude, je me suis pris par la main pour remettre le tandem en état de rouler, du coup quelques semaines plus tard, ce sont mes filles qui ont eu le plaisir de l'essayer. Génial.

Le retour à la voiture s'effectue sans nouveau problème. Il est toutefois bientôt minuit lorsque le tandem est enfin chargé sur le toit. J'ai fini par comprendre comment le monter efficacement : il faut bloquer le guidon en rotation, avec une sangle par exemple, et ce *avant* de soulever le vélo pour le mettre sur le toit. Et auquel cas, tout est simple.

Merci en tous cas Jean-Claude pour cette petite ballade, qui m'aura permis de bien profiter de ma journée en Bourgogne, me donner un prétexte pour remettre en état de marche le tandem familial, et qui sait, peut-être y aura-t-il une suite ;)

 
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Mis à jour le dimanche 14 septembre 2014.